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samedi 17 juin 2017

A Calais, « les policiers riaient en me frappant » et "Migrants et associations demandent à la justice d’intervenir"


A Calais, 

« les policiers riaient 

en me frappant »


Par Haydée Sabéran, Envoyée spéciale à Calais
 
 
 
Le 28 octobre 2016, des mineurs et jeunes majeurs dans la « jungle », démantelée depuis. Aimée Thirion pour Libération

Le défenseur des droits, Jacques Toubon, dénonce les conditions de vie des migrants dans la ville, traqués jour et nuit, sans possibilité de recevoir de l’aide alimentaire. Youssef, Erythréen de 22 ans, témoigne des sévices qu’il subit au quotidien.

 

Migrants traqués, distributions de repas empêchées par la police, mineurs à la rue, femmes en danger, bref, des « atteintes au droit d’une inédite gravité ». Une fois de plus, il s’agit de Calais, et une fois de plus le Défenseur des droits dénonce. Après la visite de ses services lundi sur place, Jacques Toubon décrit une « volonté [des pouvoirs publics] de ne plus voir de migrants à Calais », donc « plus aucun abri toléré ». Il s’indigne de ce que quelque 500 à 600 personnes, sans accès à l’eau, excepté celle offerte par les associations, « dorment à même le sol » et se disent « traqués jour et nuit dans plusieurs sous-bois de la ville ». « [Ils] ne peuvent plus dormir, se poser ou se reposer et restent sur le qui-vive », et sont « visiblement dans un état d’épuisement physique et mental ». Il réclame « la fin de cette sorte de traque, l’autorisation des distributions de repas, la mise à l’abri des mineurs sur place, la mise en place d’un lieu où les personnes peuvent se reposer, se ressourcer et envisager la suite de leur parcours. »


« Dis-moi s’il y a un lieu où je peux me reposer. Je n’ai nulle part où être tranquille », répond en écho Youssef, 22 ans, Erythréen rencontré mercredi lors de la distribution – tolérée – du repas de la mi-journée, à l’église Saint-Joseph. Il est arrivé de Libye en Europe depuis quinze jours et il est à Calais depuis une semaine. Il raconte avoir été tabassé une nuit par des policiers. « Je boite depuis trois jours à cause de la police. Ils m’ont aspergé de gaz lacrymogène dans le visage, ils m’ont frappé sur tout le corps et sur les genoux, et ils sont partis », raconte-t-il. « Ils étaient trois ou quatre. Ils riaient en frappant. Je n’ai pas résisté, j’ai mis les bras en l’air, ça n’a rien changé. » Il répète : « Il faut que je me repose quelque part. Je dors deux heures, le jour. La nuit, c’est impossible. Ils nous trouvent dans les bois, et ils nous aspergent de gaz. Nos vêtements, nos couvertures, nos sacs. Même la nourriture. Je peux comprendre qu’ils fassent leur travail, qu’ils nous attrapent quand on a fait une tentative de passage. Mais qu’ils nous empêchent de dormir, qu’ils nous frappent quand on marche dans la rue, je ne peux pas. » Il soupire : « Dans mon pays, je risque de mourir. J’ai risqué ma vie sur la route, j’ai fait un voyage impossible, j’ai traversé le désert, en Libye, j’ai fait de la prison, j’ai traversé la mer, j’ai vu la mort plusieurs fois. Maintenant, ici, quand je vois la police, j’ai peur. On stresse tous. On n’a plus que Dieu avec nous. Aujourd’hui, j’ai réussi à venir pour le repas du midi en me cachant : les policiers nous empêchaient de passer en disant "no food". Parfois, ils nous embarquent, et nous déposent à quatre ou cinq heures de marche. Vous, quand vous êtes là, on est protégés. Mais dès que vous partez, ça recommence. Racontez. On est tristes et seuls ici. »

Même pas un verre d’eau aux enfants


« Ce qui nous marque, en plus du reste, c’est que les autorités caricaturent notre travail », dit Vincent De Coninck, chargé de mission au Secours catholique. « On nous dit : "en donnant à manger, vous faites le jeu des passeurs, donc vous mettez en danger les réfugiés". » La logique du « point de fixation » peut aller loin. « Les CRS m’ont empêchée de donner à boire à des enfants de 2 et 5 ans à 8h15 ce matin », nous racontait lundi Adèle (1), retraitée de Boulogne-sur-Mer, et bénévole à l’association Salam. « On sert des petits-déjeuners aux migrants depuis plusieurs mois. Vendredi, les gendarmes nous ont dit que la distribution était interdite entre 9 heures et 18 heures. Ce matin [lundi, ndlr], les policiers nous ont dit que c’était interdit. Je leur ai demandé l’autorisation de donner de l’eau, c’était non. Et pour une petite famille qui vit dans un conteneur, un couple afghan et leurs trois enfants de 2, 5 et 7 ans, j’ai dit : "Même pas un verre d’eau aux enfants ?" Le policier a répondu : "eux comme les autres". »

Le Défenseur des droits relève aussi que les femmes sont en danger de viol et d’exploitation sexuelle. Certaines ont des nourrissons, d’autres sont enceintes. Les mineurs, nombreux, bénéficient en théorie d’une prise en charge, à ceci près qu’elle implique, « le soir et la nuit, un passage par le commissariat, ce qui rend dissuasive la démarche ». Toubon regrette aussi la fin des départs vers les centres d’accueil et d’orientation (CAO) depuis Calais et l’impossibilité de déposer une demande d’asile à Calais. Il exhorte les pouvoirs publics « à ne pas s’obstiner dans ce qui s’apparente à un déni d’existence des exilés. »

Haydée Sabéran Envoyée spéciale à Calais

Source : http://www.liberation.fr/france/2017/06/14/a-calais-les-policiers-riaient-en-me-frappant_1576829
  
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À Calais, migrants et associations demandent à la justice d’intervenir



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Mis à jour le 16/06/2017 à 8h42



 Des bénévoles distribuent des repas aux migrants le 22 mars 2017. / Philippe Huguen/AFP



Les autorités bafouent-elles les droits fondamentaux des migrants à Calais ? C’est la très solennelle question que va devoir trancher la justice dans les jours qui viennent. 
Vendredi 16 juin, une cinquantaine d’exilés et 11 associations, dont la Ligue des droits de l’homme, la Cimade, le Secours catholique Caritas France, l’Auberge des Migrants ou encore Utopia 56 (1) ont prévu de saisir le juge des référés du tribunal administratif de Lille pour « lui demander d’enjoindre aux autorités de respecter les libertés et droits fondamentaux des exilés présents à Calais », précise un communiqué commun.
L’audience au tribunal administratif, puis la décision devraient intervenir la semaine prochaine.


L’accès à l’eau, à l’alimentation, à l’hygiène en question

 

Cette saisine intervient deux jours après une communication très sévère du Défenseur des Droits dénonçant « des atteintes aux droits fondamentaux d’une exceptionnelle et inédite gravité » à l’égard des migrants de Calais.


« L’idée générale, c’est d’obliger l’État à faire le travail prévu par les lois nationales et les règlements internationaux, explique François Guennoc de l’Auberge des Migrants. Actuellement, les droits fondamentaux prévus par ces textes ne sont pas respectés, en particulier l’accès à l’eau, à l’alimentation, à la santé, à des toilettes et à des douches, ainsi qu’à un minimum d’information sur les droits, notamment le droit d’asile et la protection des mineurs isolés. »

Précisément, détaille Vincent de Coninck, au Secours catholique, on demande au juge d’enjoindre l’État à faire plusieurs choses : ouvrir un lieu d’hébergement des exilés majeurs présents dans le Calaisis et un lieu de prise en charge des mineurs isolés sur Calais même. Il faudrait aussi que soient organisées des maraudes avec des gens qui parlent la langue des exilés, notamment à destination des mineurs, qu’il faut recenser. »

De plus, ajoute-t-il, « il faut prévoir l’ouverture d’un lieu digne de distribution des repas, assuré par un prestataire, où les exilés pourront se rendre sans crainte d’être interpellés et la mise en place de points d’accès à l’eau potable, à des douches et à des latrines ».

Enfin, « dans l’attente de la mise en place urgentissime de ces mesures, on demande au tribunal de faire cesser les pressions quotidiennes sur les associations requérantes pour les laisser distribuer des repas ».

Bras de fer entre associations et autorités


Alors que les associations dénombrent près de 600 migrants sur Calais, plus aucun service public n’est proposé aux migrants depuis le démantèlement du camp fin octobre. Un bras de fer s’était alors engagé entre les associations locales désireuses de couvrir un minimum de besoins vitaux et la maire de Calais, Natacha Bouchard, soucieuse de décourager toute arrivée.

La mairie a ainsi successivement cherché à empêcher l’accès à des douches mises en place par le Secours catholique dans sa cour, puis a pris des arrêtés pour interdire la distribution de repas dans certains endroits. En février puis en mars, la justice a cependant jugé illégales ces deux initiatives municipales.



Depuis, si le Secours catholique a dû démonter les douches modulaires dans sa cour, le code de l’urbanisme ne permettant pas leur installation pendant plus de trois mois, les associations ont repris la distribution de repas. Cependant, l’Auberge des migrants, sommée de se mettre aux normes, est menacée de fermeture administrative.

Mais depuis deux semaines, le climat s’est à nouveau tendu. La situation sur le terrain « est devenue terrifiante et catastrophique », estime Vincent de Conink. « Les exilés nous rapportent que les forces de l’ordre gazent désormais régulièrement les personnes et les effets personnels comme les duvets et même les bidons d’eau », précise François Guennoc.

La distribution de repas entravée


Par ailleurs, reprend Vincent de Coninck, « le 31 mai, des policiers nous ont dit oralement qu’alors qu’on proposait deux repas par jour plus le petit-déjeuner, désormais, seul le créneau du soir pendant une ou deux heures serait toléré ». « Dès le lendemain, ajoute-t-il, plusieurs dizaines de CRS et gendarmes se sont déployés pour nous empêcher de distribuer le midi, et depuis c’est la chasse. Soit on est empêché de distribuer, soit ils font fuir les migrants en en emmenant quelques-uns en centres de rétention. »

« Les bénévoles sont aussi contrôlés et on entend des propos intimidants du type "vous n’avez pas le droit ", "tu veux faire de l’humanitaire, eh ben va le faire chez eux" », ajoute Vincent de Coninck. Depuis le 6 juin, les associations se sont donc repliées, pour le repas de midi, dans la cour de l’église Saint-Joseph avec la bénédiction du curé, le P. Rauwels.



Nathalie Birchem 
(1) L’Auberge des migrants ; La Cabane juridique/Legal Shelter ; Care4Calais ; La Cimade ; Gynécologie sans frontières ; Help Refugees ; Ligue des droits de l’Homme ; Le Réveil Voyageur ; Salam Nord Pas-de-Calais ; Secours catholique Caritas France ; Utopia 56

Source : http://www.la-croix.com/France/Immigration/A-Calais-migrants-associations-demandent-justice-dintervenir-2017-06-15-1200855198

 

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