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mardi 20 décembre 2016

Combattu par le business de la mort, le cercueil en carton peine à s’imposer

Combattu par 

le business de la mort, 

le cercueil en carton 

peine à s’imposer


16 décembre 2016 / Nicolas Bérard (L’Âge de faire) 


Alternative écologique et économique, le cercueil en carton peine pourtant à s’imposer face à la résistance du milieu des pompes funèbres.

« Je découvre un monde… » Lorsque Martine Saussol s’est lancée dans le commerce de cercueils en carton, elle ne s’attendait pas à recevoir d’inquiétants coups de fil anonymes. Elle y a pourtant eu droit. Et ce n’est qu’une péripétie dans le parcours du combattant qu’elle mène pour développer ce produit.

Lorsqu’elle s’est lancée, elle était pleine de bonnes intentions. « Je n’y peux rien, quand je vois un cercueil en bois, je vois un arbre », explique-t-elle. À juste titre, d’ailleurs, car la pratique est loin d’être négligeable : chaque année à travers le monde, on estime à plus de 11 millions le nombre d’arbres sains coupés — ce qui représente plus de 30.000 km² de forêt — pour produire des cercueils. C’est énorme, et pas forcément indispensable, surtout lorsqu’ils sont destinés à la crémation. Lorsqu’elle a eu à organiser les funérailles d’un ami « qui avait une sensibilité écolo », elle a cherché les alternatives et a découvert l’existence des cercueils en carton. Elle a ensuite rencontré toutes les difficultés du monde pour organiser la cérémonie, car « les crématoriums refusaient ce type de cercueils ».
Elle décide pourtant de développer ce concept et crée Éco-Cerc en 2012. Son produit phare : le cercueil le plus simple qui soit, entièrement en carton recyclé. « En France, 60 % du carton recyclé produit est inutilisé », précise Martine Saussol.

« On nous met des bâtons dans les roues »

 

L’idée ne plaît pas à tout le monde. À personne, même, dans le milieu très fermé des pompes funèbres, qui ont tout fait pour tuer dans l’œuf cette initiative. Le principal obstacle vient des crématoriums — une activité de plus en plus concentrée — qui refusent tout bonnement les cercueils en carton. Éco-Cerc a donc dû soumettre son cercueil à une batterie de tests pour obtenir la norme NF. C’est désormais chose faite. Cela aurait dû régler une bonne partie des problèmes rencontrés par la filière carton : avec cette norme, les crématoriums ne peuvent plus, légalement, refuser les cercueils.
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Coupe d’un cercueil en carton alvéolé de la société Éco-Cerc.

« Mais même avec cette certification, on nous met des bâtons dans les roues », témoigne Brigitte Sabatier, gérante de AB Crémation, autre entreprise proposant ce genre de produit. Elle aussi a obtenu la certification, elle aussi se heurte encore à la résistance du milieu. Certains crématoriums refusent toujours, quitte à être hors-la-loi, de s’occuper des cercueils en carton. D’autres ont instauré une taxe allant de 150 à 200 euros pour ce genre de matériel, sous divers prétextes (ils feraient plus de poussières, favoriseraient moins la combustion du corps, encrasseraient les fours, etc.). D’autres encore se plient à la loi en traînant des pieds : « Ils organisent les crémations des cercueils en carton à la première heure, ce qui pose des problèmes d’organisation aux proches, notamment parce que cela oblige à fermer le cercueil la veille. »

« On voit des cercueils arriver d’Europe de l’Est, achetés 90 euros livraison comprise et être revendus 900 euros en France ! »

 

« Le vrai problème, c’est qu’il y a énormément d’argent en jeu », estime Brigitte Sabatier. Chaque année, 600.000 cercueils se vendent en France. Au bas mot, on parle donc d’un marché d’un demi-milliard d’euros, qui va encore prendre de l’ampleur dans les décennies à venir : le « baby-boom » de l’après-guerre a commencé à se transformer en « papy-boom ». Les bénéfices s’annoncent donc encore plus juteux. « On voit des cercueils arriver d’Europe de l’Est, achetés 90 euros livraison comprise et être revendus 900 euros en France ! Dans quel autre commerce on fait du “fois dix” ? » questionne Martine Saussol.

Pour la filière bois, l’essor du carton représente une vraie menace : un cercueil en carton coûte deux fois moins cher que le moins cher des cercueils en bois (environ 350 euros contre 700). Du côté des pompes funèbres, plus les prestations sont chères, plus les marges sont importantes. Les entreprises proposant spontanément des cercueils en carton sont donc très rares. « On en a quelques-unes qui jouent le jeu, explique Martine Saussol. Face aux grands groupes du secteur, ce sont souvent de petites pompes funèbres qui exploitent cette niche pour se démarquer. » Les acheteurs apprécient le côté écologique du carton, mais leur démarche peut aussi être menée « dans le but de faire un pied de nez au business de la mort ».

Comme les pompes funèbres regimbent, les entreprises de cercueils en carton vont donc directement à la rencontre de leur clientèle. Pendant huit ans, Brigitte Sabatier a fait tous les salons de la mort pour vendre son produit aux professionnels. Sans succès. « Je me suis aperçue que je travaillais à l’envers : il faut aller voir les particuliers pour qu’eux réclament du carton. » Par ailleurs, certains commencent à inscrire ce souhait dans leur testament. Dès lors, le respect de cette volonté devient une obligation légale.



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Lire aussi : Cercueils en carton et corps rendus à l’humus : le cimetière devient écolo
Source : Article transmis amicalement à Reporterre par L’Âge de faire.



Photos :
. chapô : © Cercueil carton
. cercueil : © Éco-Cerc

Source : https://reporterre.net/Combattu-par-le-business-de-la-mort-le-cercueil-en-carton-peine-a-s-imposer


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