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mercredi 28 octobre 2015

Marinaleda et ses 3000 insoumis



Marinaleda. Une petite ville de 3 000 habitants, au cœur de l’Andalousie, dans le sud de l’Espagne. Ici, il n’y a pas de policiers, pas de voleurs, ni de sans abris. Ici, il y a moins de chômage qu’ailleurs, et on partage le travail. Ici, on paie son loyer 15 euros par mois. Ici, le maire et ses adjoints ne sont pas rémunérés, et ce sont les habitants qui commandent.
Marinaleda développe depuis les premières élections libres de 1979 un système social et politique à contre-courant du modèle prédominant. En 1991, ses habitants ont obtenu du gouvernement régional par des actions incessantes 1 200 hectares qu’ils exploitent aujourd’hui en coopérative. Cette coopérative intègre ses propres unités de transformation et commercialise sa production.
Marinaleda
Marinaleda est née dans les années 1970. A l’époque, l’Espagne connaît une double crise : politique, avec la mort du dictateur Franco, et économique. Le village andalou est durement frappé : 60% de chômage et la famine prennent à la gorge cette communauté agricole sans terre. A l’époque, les champs alentours appartiennent à des familles aristocratiques richissimes, qui préfèrent investir dans des plantations que l’on peut automatiser (comme le blé qui nécessite des machines pour la récolte), plutôt que des cultures qui nécessitent la main de l’homme. Trois décennies plus tard, les champs de blé sont devenus des champs d’artichauts et de tomates, et tous les habitants du village ont un travail et un toit.
Aux premières élections communales après la dictature franquiste, en 1979, le Syndicat des ouvriers agricoles, récemment créé, remporte les élections communales avec 9 conseillers sur 11. Juan Manuel Sanchez Gordillo est élu bourgmestre. Le modèle économique est alors décidé collectivement.
marinaleda city
Depuis, dans le village de Marinaleda, tout le monde gagne le même salaire, qu’on travaille au champ, à l’usine ou dans les bureaux, soit environ 1 200 euros par mois. De quoi bien vivre, puisque tous les services et le logement sont gratuits, ou presque. Les loyers sont en effet de 15 euros par mois pour une maison de 90 mètres carrés. Le droit au logement est garanti : la municipalité fournit le terrain et la personne qui souhaite s’installer est aidée pour construire elle-même sa maison.
Les maisons sont construites sur des terrains municipaux. Celui qui fait la demande s’engage à construire sa propre maison, mais il est aidé par un chef de chantier et un architecte rémunérés par la mairie. Un accord avec le gouvernement régional d’Andalousie permet de fournir les matériaux. En deux ou trois ans les travaux sont terminés, la maison appartient à celui qui l’a bâtie, et il n’a plus qu’à payer 15 euros par mois.
L’accès à la santé, à l’éducation et aux activités culturelles est gratuit ou presque, ainsi que les services comme la garderie et Marinaleda a une taxation parmi les plus faibles d’Andalousie. Le travail, la culture, l’éducation et la santé sont considérées comme un droit. Une place à la crèche avec tous les repas compris coûte 12 euros par mois. La piscine municipale est à 1 euro par mois.
Le système est simple : les habitants ont créé une coopérative qui ne redistribue pas les bénéfices, mais réinvestis pour créer du travail. Le salaire de tous les travailleurs, quel que soit le poste qu’ils occupent est de 47 euros par jour, six jours par semaine, à raison de six heures de travail quotidien.
marinaleda workers
« Nous avons appris que ce n’était pas suffisant de définir ce qu’est une utopie, ni même de se battre contre les forces réactionnaires, raconte Sánchez Gordillo, toujours maire du village depuis 1979, dans une interview accordée au journal El Pais en 1985, et cité dans le livre de Dan Hancox. Il faut construire ici et maintenant, brique par brique, patiemment mais sûrement, jusqu’à ce que nos vieux rêves deviennent réalité : qu’il y ait du pain pour tous, la liberté pour tous les citoyens, la culture, et être capable de lire avec respect le mot “paix”. Nous croyons sincèrement qu’il n’y a pas de futur qui ne soit construit sans le présent ».
Une philosophie qui a mené ce maire communiste non-encarté à soutenir toutes les initiatives de résistance à la crise économique. En août 2012, Sánchez Gardillo a ainsi lancé des occupations de terres militaires, la saisie d’un château, et a entrepris une marche de trois semaines dans le sud espagnol pour inciter les autres maires à ne pas payer leurs dettes municipales.
A l’heure où la crise entraîne l’expulsion de 40 familles andalouses par jour, le modèle communiste de Marinaleda commence à faire des petits. Ainsi du village de Somonte, une coopérative fondée en 2013 sur le même modèle que Marinaleda. Mais ici, ils ne sont que deux douzaines à exploiter 400 hectares de terre. Probablement l’un des rares endroits, sinon le seul, qui réclame de la main d’œuvre en Espagne. Sur les murs, des portraits de Malcolm X ou Zapata, et ce slogan : “Andalous, n’émigrez pas, battez-vous !”.
Reportage de 26 minutes Marinaleda – Les insoumis réalisé par Yannick Bovy en mars 2015.




“Il nous a fallu trente ans pour en arriver là. Pas besoin d’être grand clerc pour comprendre que ce sont nos solutions qui marchent. La spéculation immobilière, elle, ne pouvait rien donner de bon. C’est la cupidité qui a plongé le monde dans la crise. Les gens sont surpris lorsqu’ils voient qu’ici il n’y a presque pas de chômeurs et que tout le monde a sa propre maison. Mais c’est pourtant ça qui est normal. Ce qui n’a pas de sens, c’est ce qui se fait ailleurs. Et qu’on ne vienne pas me dire que notre expérience n’est pas transposable : n’importe quelle ville peut faire la même chose si elle le souhaite.”

Juan Manuel Sánchez Gordillo
Juan Manuel Sanchez Gordillo
Plus d’infos en espagnol sur le site de Marinaleda.
Sources :
Source : https://bonnesnouvellesinfo.wordpress.com/2015/09/18/marinaleda-et-ses-3-000-insoumis/

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