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mardi 3 février 2015

A choisy-le-Roi, les Roms sont logés à bonne enseigne

À Choisy-le-Roi, 
les Roms sont logés à bonne enseigne


ÉMILIEN URBACH JEUDI, 29 JANVIER, 2015 L'HUMANITÉ





Dans cette ville du Val-de-Marne, la municipalité s’est engagée il y a cinq ans dans un projet d’insertion de vingt familles expulsées d’un bidonville. Une expérience réussie qui montre que des solutions sont possibles en termes d’accueil et de respect de la dignité humaine.
Ce mardi matin, Gérard Chambon, adjoint au maire de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne), fait grincer le portail en fer qui donne sur le jardin d’un pavillon en pierre, situé au numéro 4 de la voie des Roses. « Nicoletta ! » se met-il à crier. « Nicoletta ! » La porte de la bâtisse de trois étages s’ouvre. Elle est promise à la destruction, d’ici deux ou trois ans. Mais aujourd’hui, en sortent côte à côte Alain, habitant de l’immeuble depuis plus de trente ans, et Cosmin, l’époux de Nicoletta. Il vient d’emménager dans l’appartement du troisième. « Montez, invite ce souriant moustachu, Nicoletta est à la maison. Alain va vous accompagner. » Nicoletta est en arrêt maladie. Elle vient de se blesser au travail. Elle a le bras en bandoulière mais le regard pétillant.

Un projet d’insertion baptisé « Permis de vivre »

Nicoletta fait partie des 70 Roms à qui la municipalité (PCF) de Choisy vient de donner accès à un logement transitoire, dans le cadre d’un projet d’insertion baptisé « Permis de vivre ». Depuis plus de quatre ans, suite à l’évacuation manu militari, en août 2010, du bidonville situé aux abords de l’autoroute A86, l’équipe municipale, accompagnée par la Fondation Abbé-Pierre et l’association d’insertion ALJ93, s’acharne à faire bouger les lignes politiques dans l’accueil des Roms en région parisienne. « À 6 heures du matin, le camp était noir de policiers, se souvient Nicoletta, assise sur le canapé du salon fraîchement repeint. En quelques heures, nous étions tous à la rue. Femmes, hommes, enfants, vieillards et malades, complètement abattus. Mais nous avons rencontré des gens qui avaient du cœur et de l’humanité. » Immédiatement, Gérard Chambon a convaincu le maire communiste de l’époque, Daniel Davisse, d’ouvrir en urgence le gymnase municipal. Le collectif Romeurop a commencé à organiser la solidarité et l’équipe municipale s’est mise à imaginer un projet d’insertion pour cette vingtaine de familles naufragées des politiques répressives de l’ère Sarkozy.
Un mois après l’expulsion, un site d’accueil d’urgence a été installé. Vingt-deux caravanes en bon état ont été acheminées par la Fondation Abbé-Pierre et deux préfabriqués dédiés à la cuisine, au linge et aux sanitaires mis à disposition par le conseil général. Un médiateur, employé par la municipalité, a assuré une présence quotidienne pour accompagner les familles. ALJ93 a, pour sa part, élaboré un parcours d’insertion axé sur la scolarisation des quarante enfants, la protection sanitaire, l’apprentissage de la langue et la recherche d’emploi.

« Les usagers ont participé à la réhabilitation 

de leur logement »

Les acteurs de ce partenariat se sont aussi très vite concentrés sur la recherche de logements. Ils ont convaincu Valophis Habitat, l’opérateur HLM, de leur mettre à disposition des appartements promis à la destruction dans le cadre de projets de transformation urbaine, mais qui devaient rester vides et inutilisés pendant plusieurs années, avant le démarrage des travaux. « On a été obligé de sortir du cadre de nos contraintes habituelles, commente, non sans fierté, Stéphane Mathiot, chef d’agence chez Valophis. Ça n’était pas gagné d’avance, tant au sein de nos équipes qu’auprès du voisinage, mais on a finalement signé une convention bisannuelle pour quelques logements. On l’a prolongée de deux ans, au printemps 2014, et on n’a pas envie de s’arrêter là. »
Petit à petit, le site d’accueil s’est vidé, au fur et à mesure que les nouveaux logements transitoires étaient attribués. « Nous avons refusé d’entrer dans une logique d’assistanat, précise Gérard Chambon. Les usagers ont participé à la réhabilitation de leur logement. » Il tend la main à Nicoletta, qui ne parvient pas à contenir les émotions douloureuses qui la traversent lorsqu’elle évoque son enfance roumaine et la succession des bidonvilles où elle a vécu depuis son arrivée en France. « En Roumanie, j’ai souffert de la faim et du racisme, explique-t-elle. En France, à chaque expulsion on perdait tout. Ça fait mal de raconter tout ça mais je ne veux pas oublier d’où je viens. J’ai fait des efforts. Avant d’avoir un emploi de femme de ménage, je vendais des fleurs dans la rue. En même temps, je prenais des cours de français, participais au stage d’ALJ, recherchais du travail et m’occupais de mes deux filles. Il y a des jours où j’ai pleuré, des jours où je ne mangeais pas, où mes pieds restaient mouillés… Mais il faut se battre et avancer. Nous aussi, on a des valeurs. » Gérard nous conduit vers un autre appartement, à deux rues du pavillon. La table est dressée chez Georges, Borca et leur fille Julia. Ils partagent le logis avec les parents du jeune père de famille. « Je vis en France depuis l’âge de dix ans, raconte-t-il. Je lis mieux le français que le roumain. J’ai été à l’école du CM2 à la première. Jusqu’à aujourd’hui, j’ai vécu dans des bidonvilles. » Et la joyeuse assemblée d’éclater de rire quand Georges ajoute : « Je remercie Dieu et Gérard Chambon ! » Il est heureux de savoir que sa fille est maintenant promise à une autre enfance que celle qu’il a connue. « Plutôt mourir que de repartir en caravane », confie-t-il à voix basse.
« Ces familles peuvent maintenant accéder au droit commun », précisait, vendredi dernier, Didier Guillaume, l’actuel maire communiste de Choisy-le-Roi, lors d’une soirée organisée pour fêter la réussite de l’initiative. « Tous sont aujourd’hui inscrits comme demandeurs de logements sociaux, au même titre que n’importe quel habitant de la ville. Ça n’a pas été simple. L’adoption de la circulaire interministérielle d’août 2012, donnant un cadre législatif aux démantèlements des bidonvilles, nous a aidés. Mais il a fallu bousculer les habitudes administratives. » Et d’ajouter : « Il y a ce qui est légal, mais surtout, il y a ce qui est légitime. » Légitime, la scolarisation de tous les enfants. Légitime, l’accès de toutes les familles à la couverture santé (CMU ou AME). Légitime de déclarer ses impôts, d’être inscrit à Pôle emploi, d’ouvrir un compte bancaire… et légitime aussi d’avoir un toit.
Chez Nicoletta, la rénovation des chambres, salon et couloirs est achevée. Il faut encore s’occuper de la cuisine et de la salle de bains. Mais, pour la famille, le quotidien s’est enfin réellement transformé. « Le regard des gens a changé, reprend la jeune femme. Ceux qui habitent près du terrain où nous avions les caravanes se plaignaient souvent de notre présence. Aujourd’hui, ils me saluent dans la rue. »
Il reste cependant encore des barrières à franchir. Nicoletta est inquiète pour le renouvellement de sa carte de séjour. « Je peux travailler avec ma carte d’identité roumaine, explique-t-elle. Maintenant, je peux présenter des fiches de salaire et un justificatif de logement. J’en ai toujours sur moi en cas de contrôle de police. Mais les employeurs sont suspicieux à l’égard des Roms. C’est plus facile avec une carte de séjour. » Son regard est mouillé quand il est tourné vers le passé mais il s’illumine quand il regarde l’avenir. « Je souhaite maintenant que mes filles obtiennent la nationalité française, sourit Nicoletta. Je vais me renseigner sur les démarches à suivre. Elles sont toutes les deux nées ici. » Elle tire une photographie de son portefeuille. « La plus jeune. À l’école, elle est excellente en mathématiques. »
Trois bidonvilles démantelés, zéro solution. Mardi matin, trois bidonvilles situés à Noisiel et à Champs-sur-Marne ont été démantelés par la préfecture de Seine-et-Marne. Les cent vingt habitants, qui n’avaient reçu aucune proposition de relogement, ont décidé d’occuper la mairie annexe de Noisiel afin qu’une solution soit rapidement trouvée pour ses familles promises au froid. La préfecture a donné l’ordre à la police d’évacuer les lieux. Deux personnes, dont un membre du collectif Romeurop, ont été arrêtées.

Source : http://www.humanite.fr/choisy-le-roi-les-roms-sont-loges-bonne-enseigne-564075

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